Revue des oralités du monde – Appel à contribution

Pour son troisième numéro, qui paraîtra en avril 2024 et qui sera un volume  de varia, la Revue des oralités du monde lance un appel à contribution. Les articles s’inscriront dans la ligne éditoriale de la revue et porteront sur des problématiques liées à l’oralité ; voir : « Ligne éditoriale » : https://oralites-du-monde.huma-num.fr/ligne-editoriale/

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LES ORALITES DU MONDE

Un domaine disciplinaire

 

 

L’oralité place la parole au centre de la communication. Reconnue dans la déclaration de l’UNESCO (octobre 2003) comme partie intégrante du patrimoine immatériel de l’humanité, elle n’est pas seulement un héritage du passé qui instaure un lien avec notre présent à travers la transmission, elle est contemporaine et vivante et elle peut être étudiée comme un art verbal à part entière fondé sur la voix et la gestuelle. Son domaine d’expression privilégié est la littérature orale.

Celle-ci comprend de nombreux genres très variés, à contenus, formes et fonctions différents, comme l’épopée, le conte, le proverbe, la poésie. Souvent associée au seul cadre rural, elle est pourtant présente en contexte urbain et ouverte à des formes nouvelles, comme la néo-oralité qui adapte des genres attestés traditionnellement pour être accessibles dans des situations différentes.

L’oralité s’intéresse aux faits sociaux, à la fois dans leur permanence et leurs transformations. Elle observe et étudie les faits sociaux du passé mais aussi du présent, dans leur actualité et en tant que phénomène naissant. L’oralité repose sur des pratiques langagières spécifiques articulées avec des pratiques sociales précises qui impliquent la régulation de la circulation de la parole. Elle exprime des représentations culturelles singulières liées aux milieux où elle évolue. Elle est un outil puissant de transmission et concerne les langues, les représentations du monde et les identités culturelles. Nécessairement sociale, elle est l’une des expressions privilégiées de la culture qui la pratique. De ce fait, elle est un vecteur incontournable dans l’acquisition de la langue et des représentations et des valeurs culturelles que celle-ci véhicule.

L’oralité est attestée dans de nombreuses aires géoculturelles. Sont concernés par exemple: l’Asie et le Pacifique; l’Afrique et l’Océan Indien; les Amériques; l’Europe et l’Eurasie; le Proche-Orient, le Moyen-Orient et le Maghreb.

Des travaux de recherche, portant par exemple sur une oralité donnée ou sur un genre de la littérature orale dans une ou plusieurs langues (épopée, conte, textes oraux), ont été réalisés; des approches méthodologiques ont été créées et développées, comme l’ethnolinguistique dans les années 70 ou l’ethnopoétique dans la décennie suivante; de nouvelles formes d’expression relevant des arts du spectacle vivant voient le jour, différentes formes de néo-oralité sont expérimentées. L’oralité se situe ainsi au carrefour de plusieurs disciplines, notamment la linguistique, la littérature, l’anthropologie, les religions, l’éthnomusicologie et les arts du spectacle vivant, entre autres.

Cependant, l’oralité et à plus forte raison les oralités du monde dans leur globalité, restent souvent mal connues, y compris dans les milieux académiques.

Déconstruire une vision erronée

La convergence de plusieurs facteurs peut expliquer cette situation, entre autres le statut des langues, de même que des erreurs méthodologiques fréquentes. Ainsi, à travers le monde, l’oralité se manifeste en contextes plurilingues et dans des langues qui ont souvent le statut de langues minorées1. La diversité culturelle est considérable et l’état de la documentation est très inégal, ce qui rend très difficile l’élaboration d’une vision générale des réalités culturelles concernées. Par ailleurs, l’oralité est très souvent située et perçue implicitement ou explicitement dans une approche comparative par rapport à la scripturalité. Dans cette seule perspective réductrice, elle est marquée par le sceau indélébile d’un « manque », d’un « moins – évolué, développé, civilisé », d’un écart par rapport au « standard culturel ». Il n’existe pas d’approche globale de l’oralité dans une définition disciplinaire.

Changer d’approche

Dépasser la marginalisation des oralités qui sont souvent catégorisées comme appartenant au Sud (en « voie de développement ») – mais qui existent bien ailleurs –, nécessite un changement de point de vue et d’approche. Il s’agit de développer un positionnement politique et une politique scientifique nouveaux.

En effet, le fait de remettre en cause des « évidences » ouvre la voie à une vision nouvelle. Interroger la portée idéologique de certaines affirmations qui postulent l’idée que les oralités appartiennent à des populations « incapables de développer et/ou de maîtriser l’écriture » est une nécessité. Un tel changement de perspective permet de prendre en compte la dimension politique de la question des oralités du monde. En effet, elles sont souvent confrontées à des formes de domination politique et culturelle. Celles-ci varient d’un contexte à l’autre. Elles ont pour conséquence, la non reconnaissance de la « valeur » des oralités.

            Ce changement d’approche doit éviter deux écueils :

            Le groupe de recherche prend en considération toute oralité, quel que soit le statut sociolinguistique de la langue concernée. Ce critère objectif évite la division des oralités – qui pourrait stipuler ou sous-entendre qu’une oralité serait plus importante ou rayonnante qu’une autre.

            D’un autre côté, la littérature orale, le domaine le plus raffiné de l’oralité, est abordée comme  l’expression de visions du monde, de prises de position et de représentations culturelles. La littérature orale s’inscrit dans des réalités précises, mais elle n’est pas le « reflet » des réalités culturelles concernées. La contextualisation sociale, anthropologique, politique, historique et esthétique permet d’appréhender cette dimension. C’est une précaution méthodologique qui évite à l’analyse de minimiser le potentiel conflictuel et la portée idéologique de la littérature et qui, au contraire, lui permet d’en rendre compte.

Les objectifs des ORALITES DU MONDE

Le groupe de recherche a pour objectif de contribuer à la reconnaissance du domaine en tant que discipline. Ceci suppose de constituer le champ et d’en définir les spécificités méthodologiques et théoriques de manière plus précise.

La méthode de travail consiste à:

        • documenter les travaux de recherche qui sont souvent de grande qualité scientifique, mais méconnus,
        • fédérer les initiatives de recherche,
        • élaborer des ressources de référence,
        • consolider l’enseignement et la recherche,
        • à travers un site internet, créer de meilleures conditions pour faire connaître le domaine et les recherches qui lui sont dédiées,
        • créer par la convergence de ces activités de recherche les conditions pour la reconnaissance de l’oralité comme une discipline.

 

LES ORALITES DU MONDE

Un site dédié à la recherche et à la documentation

 

 

Le site sera organisé autour des axes suivants:

L’annuaire des oralistes organise la documentation concernant les spécialistes des oralités, ainsi que les institutions de recherche et d’enseignement. Il est l’une des bases pour l’élaboration d’une bibliographie et pour la mise en réseau des recherches.

La présentation analytique des oralités a pour objectif de présenter selon un format commun et à partir des langues utilisées, différentes oralités. A celles représentées depuis le lancement du groupe de recherche s’ajouteront les oralités dans d’autres langues. Le site est ainsi appelé à évoluer de manière régulière. Les problématiques essentielles communes structurant les recherches sont la transmission et l’enseignement des oralités. L’enjeu est de produire des ressources de référence permettant d’analyser les dynamiques socioculturelles qui sous-tendent les oralités dans les différentes parties du monde. L’approche comparatiste des oralités – fondée sur des données vérifiées et garanties scientifiquement par les spécialistes des différents domaines – ouvre ainsi la voie à une meilleure compréhension des pratiques culturelles produites en contexte d’oralité: leur variété, leur richesse et les caractéristiques fondamentales qu’elles partagent.

La revue scientifique: des recherches plus ponctuelles peuvent être envisagées dans une deuxième phase en créant une revue scientifique.

La documentation audio et audiovisuelle sous forme de « médiathèque » avec index et renvois:

        • l’oralité dont relève le document doit être déjà présentée sur le site;
        • tout document est contextualisé en indiquant: la performance (où, quand qui; occasion, cérémonie, rituel, autre); la collecte et l’enregistrement (qui a enregistré le document, quand, où, destination); le statut du document (oralité première, néo-oralité, documentation (ex: reportage etc), documentation culturelle à destination des locuteurs;
        • le contenu: le document est transcrit (et éventuellement translittéré) ; il est traduit en français ou en anglais (ou accompagné d’un résumé détaillé en français ou en anglais).

La cartographie

Une carte des oralités du monde est progressivement établie.

Ursula Baumgardt

 


 

Note:

1  La notion de « langue minorée » renvoie au statut sociolinguistique d’une langue dans sa dimension politique.

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